mardi 5 juillet 2011

Mardi 5 juillet 2011 - Scènes de ménage

Ce matin, donc, RER A et coup de chance, une rame à deux étages. Debout, certes, mais rencogné juste à la porte, je profite de la climatisation qui me distille au-dessus de l'occiput, une brise bienvenue.
Sartrouville arrivant et puis Houilles et le voyage vire à la compression "césarienne" avec en prime une halte à l'interconnexion Nanterre-Préfecture qui s'éternise suite à un "incident". La climatisation n'est plus qu'un lointain souvenir, la chaleur "animale"du wagon à bestiaux l'annihilant complètement. Coincé entre un malabar à la sueur âcre et un nain que je surplombe et qui m'encense d'un after-shave aux effluves nauséabondes, j'aurais pris mon parti si en sus des nuisances olfactives ne s'étaient pas ajoutées les nuisances auditives d'une jeune femme, catégorie employée, relevant de ma typologie combinée "accro du portable" et "Ginette".
Cette dernière montée dans le wagon à Sartrouville et réfugiée sur les marches de l'escalier menant au second étage, va hurler dans son portable sans discontinuer jusqu'à Charles de Gaulle - Étoile, soit vingt bonnes minutes en tenant compte de la halte de Nanterre.
Petit drame domestique amusant dans la fiction d'après 20 heures sur M6 mais sinistre dans une rame du RER A bondée. Sinistre, triste et révélateur aussi d'une situation humaine courante mais néanmoins pitoyable dans notre contexte sociologique urbain et stressant. La femme s'engueule avec son Jules resté à la maison. Durant vingt-minutes cauchemardesques, en boucle, s'effectue un règlement de compte lancinant et impudique, hallucinant car exposé sur la place publique sans aucune retenue.
Le Jules reproche à sa Ginette de ne pas l'avoir prévenu qu'elle partait et pourtant la malheureuse détaille les papouilles tendres puis rageuses qu'elle lui a prodiguées pour l'avertir de son départ. Elle a démarré la voiture mais même le bruit de moteur ne l'a pas pressé. Finalement la voiture est partie sous son nez le laissant comme un gland sur place. Là l'auditeur et spectateur "captif", ne comprend pas bien si le "beauf" est agacé de n'avoir pu palucher une fois de plus sa gonzesse ou s'il l'est parce qu'il va arriver en retard au turbin. La suite de la conversation permet de penser que l'agacement relève du paluchage contrarié. La jeune femme presque en larmes, hurle que "elle, elle bosse" et qu'elle ne supporte plus que son Jules "lui prenne la tête comme ça quasiment tous le matins, vu que déjà le boulot et les transports c'est pas drôle". Le Jules semble donc devoir être rangé dans la catégorie des "beauf" machistes et égoïstes qui plus est grosses feignasses.
Puis vient l'histoire du couple, celle d'un couple qui se défait sous vos yeux et dont il est presque certain qu'il explosera incessamment sous peu. Détails sordides du style "vase de Soissons", "conversation" qui s'achève dans un sanglot nerveux juste avant l'arrivée à sa station, la jeune femme qui n'est pas vilaine a le regard d'une infinie tristesse, brouillé par des larmes à peine contenues.
Petite tragédie dérisoire d'une humanité peu digne d'intérêt et d'attention, totalement déplacée parce que la sphère intime se répand et vient comme un acide, rongée la bulle que chacun des naufragés tente de maintenir étanche tant bien que mal. Mais justement petite tragédie au bout du compte assez poignante par son contexte et ce qu'elle suppose d'une misère sentimentale et d'une souffrance individuelle exprimées dans le monde métropolitain par définition collectif et indifférent.

Deezer : Les histoires d'amour...Catherine Ringer - Rita Mistouko

1 commentaire:

  1. Emilie-Charlotte François6 juillet 2011 à 16:22

    Il n'est plus rare de voir dans le rer ces chagrins d'amour. D'autres disputes sont plus drôles, en voilà une arrivée dans le métro (le naufragé ne m'en voudra pas d'extrapoler vers ces contrées lointaines du métro). Donc 18h30, métro 8, une femme tripatouille son portable. Premier appel, elle semble reprocher à son interlocuteur sa lâcheté en insistant lourdement sur le fait qu'elle ne "supporte pas" (mais alors vraiment pas) les gens qui ne disent pas pourquoi ils font la "gueule". Deuxième appel, là elle s'adresse au répondeur d'une certaine Emmanuelle, connaissance du précédent interlocuteur qui s'appelle (on l'apprend)alors Christine. Reprenant son leitmotiv, notre héroïne réinsiste sur le fait qu'elle ne supporte pas la lâcheté et après moult explication notamment sur les 30 euros empruntés qu'elle aimerait bien rendre, demande à cette Emmanuelle de faire le messager et que les 30 euros feront escale chez elle avant de rejoindre le portefeuille de Christine. Tout ça bien sûr comme si une véritable conversation avait lieu alors qu'elle parle à un répondeur... étonnant ! Troisème acte, elle rappelle la dénommée Christine pour lui répéter au bas mot 10 fois que si c'est une histoire d'argent, c'est vraiment ridicule et qu'elle va lui rendre. Ah oui, elle parle toujours au répondeur. Mon dieu quel divertissement, je n'aurai pourtant pas le fin mot de l'histoire car la Emmanuelle appelle et enfin notre héroïne ne parle plus dans le vide... sauf que moi c'est ma sortie ! Et pur hasard, hier je croise en rentrant à Opéra cette femme le portable toujours à l'oreille ! Magique !

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