mardi 17 mai 2011

Mardi 17 mai 2011

Jour tranquille pour le naufragé du RER A. Rien à signaler ni la matin ni le soir et pourtant j'ai emprunté le RER A à l'aller comme au retour.

Une petite scène vécue ce matin tout de même a relaté. Elle est sans importance  mais je la trouve amusante parce que révélatrice des obsessions, des préoccupations que nous entretenons tous et qui sont aussi variées qu'il y a d'individualités.
Je monte à Maisons-Laffitte et vu l'affluence je reste debout jusqu'à la Défense. Cela me permet de regarder et d'écouter une légère altercation entre deux jeunes femmes assises près d'une fenêtre et l'une en face de l'autre.
 Je distingue la première de dos, une étudiante ou une toute jeune cadre au physique avenant, cheveux châtains, un peu plus de 25ans. La seconde que je contemple de face est un peu plus âgée, une légère trentaine un peu dépassée, c'est plutôt une employée de bureau, secrétaire sans doute, ou une vendeuse de magasin. Brune, un physique passable, un look plus tapageur, un visage dont on perçoit qu'il est assez maquillé et une attitude un peu plus plébéienne que celle de son vis à vis.
C'est justement à propos du maquillage que l'altercation se déroule. Comme cela arrive parfois, soit que ses obligations familiales l'aient empêché avant de quitter son domicile de se faire une "beauté" soit que sa nuit ait été tumultueuse, toujours est-il que la brune se maquille. Sa trousse est sur ses genoux et durant toute la durée de l'altercation, elle va se ravaler la façade. Tout y passent, fard à paupières, rouge à lèvres, poudrage, jusqu'au vernis à ongles, c'est à dire pendant un bon quart d'heure.
Quand je parle d'altercation, ce n'est pas tout à fait exact, car la brune trop occupée à ses soins "intimes" ne dira quasiment rien, un léger sourire ironique passant fugitivement sur son visage.
En fait, sous le regard amusé et quelque peu interloqué des voyageurs, la jeune cadre sans se lasser d'une voix discrète mais distinctement audible, critique le comportement de la brune et se plaint de sa séance de soins esthétiques. En substance, elle entame une sorte de monologue entrecoupé de silences. Elle trouve que la brune est mal éduquée, que cette séance de maquillage la dérange, que c'est un manque de respect pour les autres, que de tels soins relèvent de la sphère domestique et intime, que c'est une atteinte visuelle gênante, que c'est à la limite dégoûtant et qu'à ce train-là il ne manque plus qu'elle fasse carrément sa toilette devant elle. Les reproches sont mesurés mais tenaces, ils vont quand même sur un rythme crescendo. La Défense arrive, la brune imperturbable range son matériel et se lève pour descendre de la rame, plantant là, la jeune cadre outragée.
Je me suis souvent fait la réflexion qu'il était étrange de voir ce genre de séance de maquillage et que les femmes qui s'y livraient, révélaient une certaine forme d'impudeur voire d'exhibitionnisme mais j'avoue qu'il ne me serait pas venu à l'idée de prendre à partie publiquement les intéressées. Bien d'autres choses me dérangent dans le comportement de mes contemporains naufragés, de façon beaucoup plus agressives pour moi et pour  lesquelles, même si je suis d'un naturel plutôt paisible et accommodant, je n'hésiterais pas à me plaindre mais pas pour ça.
Visiblement pour cette jeune femme "propre sur elle" comme on dit, ce comportement devait toucher un ressort particulier, quelque  chose de peut-être profond ou inconscient, et déclencher chez elle le besoin irrépressible de se plaindre.
Comme quoi nous avons tous nos sensibilités, nos failles, nos manies et une manière parfois très différente de concevoir cette bulle dont j'ai déjà parlée à plusieurs reprises dans d'autres messages et dont nous ne supportons pas que d'autres y pénètrent, cette intrusion pouvant donc revêtir une multitude de formes.


La nature humaine est toujours décidément passionnante à observer.


Deezer : Air des bijoux, Faust, Charles Gounod, Victoria de Los Angeles

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire