lundi 18 juillet 2011

Lundi 18 juillet 2011 - EELV : un naufrage programmé ?

Sans doute parce qu'il ne fait pas trop chaud en ce moment, le naufragé du RER A n'a pas connu de difficultés aujourd'hui. Un temps de cochon qui nous a ainsi évité la "dilatation" des rails et la "fonte" des caténaires et comme ce temps maussade n'a pas dégénéré en un hiver au coeur de l'été comme pour les malheureux cyclistes du col du Galibier, nous évitâmes également les ruptures de lignes dues au gel !
Pas de problèmes donc pour moi, par ailleurs, même avec des horaires d'été allégés, les départs en vacances produisent leur effet et j'ai pu par conséquent voyager assis à l'aller comme au retour et méditer le message d'humeur ci-dessous.

Un éditorial du Nouvelobs.com signé Laurent Joffrin est intitulé "Eva Joly, la naïve inconséquente".
La polémique déclenchée à l'occasion des propos d'Eva Joly sur la suppression du défilé militaire du 14 juillet, relève-t-elle vraiment de sa part de la naïveté et ou de l'inconséquence, s'agit-il au contraire d'une habile opération de communication ?
Il est vrai que les médias, une fois l'affaire DSK repoussée au 1er août sont en manque de sujets croustillants et que les français planqués sous leurs tentes de camping bien arrosées en ce mois de juillet morose et pluvieux, constituent une clientèle captive et réceptive. S'attaquer au 14 juillet surtout dans le contexte particulier du défilé 2011, il fallait le faire, on suggère d'ailleurs à Mme Joly de rééditer son coup d'éclat en fustigeant l'inanité du Tour de France, autre grand évènement saisonnier de ce septième mois de l'année, il lui reste quelques jours.
Les journalistes et autres présentateurs de JT courageux qui aspirent à rejoindre leurs confrères déjà partis depuis longtemps pour leurs demeures de l'arrière-pays provençal et qui pour quelques semaines vont se consacrer à suivre la ligne bleue de leur piscine plutôt que leur stimulante ligne blanche habituelle, doivent sans doute remercier de tout leur cœur, la nouvelle pétroleuse écologique de cette manne estivale inespérée.

Donc, réaction à chaud d'une norvégienne pacifiste dérangée par le bruit des chenilles de char sur les pavés de la Bastille ou bien démarrage diabolique et machiavélique de sa campagne présidentielle 2012 ?
La candidature atypique de Mme Joly interroge, de même que le large soutien des Verts lors des primaires EE-LV. A la trappe Daniel Cohn-Bendit, aux oubliettes de l'histoire (?) Nicolas Hulot mais pour quelle stratégie en définitive ? Le score à deux chiffres (grosso modo 16% pour les Européennes de 2009 et 12% pour les régionales de 2010) semble très peu probable pour 2012. Les 10% espérés en juin 2011 par Nicolas Hulot et Eva Joly relèvent sans doute aujourd'hui (accélération de l'histoire) du doux fantasme, un score au-dessus des 5% seraient déjà miraculeux.
La "machine à perdre" dont on ne sait pas encore si elle a été enclenchée pour le P.S, tourne en tout cas donc à plein régime et sans plus attendre pour EELV. Dès lors la "naïve inconséquence" de Mme Joly prend une tonalité particulière.
La "troisième voie" ouverte en 2009 par Daniel Cohn-Bendit a vécu et mal. Dans notre pays, cette troisième voie est maudite, tous ceux qui ont tenté d'en initier une s'y sont cassés les dents et ont fait naufrage, notre traditionnel clivage Gauche-Droite a décidément la vie dure.
Les femmes et les hommes de conviction (soyons gentils en y incluant les écologistes non sectaires, Bayrou, Royal qui persiste, Borloo et De Villepin) en ont fait ou en feront, à n'en point douter, la triste et amère expérience.
En fait, opportunistes ou non, ces explorateurs naufragés ne sont et ne seront que des supplétifs des grands partis politiques "historiques", à leur corps défendant ou à l'insu de leur plein gré.
Dès lors la "sortie" de Mme Joly peut s'expliquer et loin d'être la conséquence d'une inconséquence, se révéler la tactique d'une femme fort intelligente, bonne connaisseuse de notre histoire politique, tout à rebours de ce que dit François Fillon, et qui entend en quelque sorte sauver ce qui peut encore l'être des "meubles" de 2009.
Le naufragé "honnête homme "du RER A met pour une fois son humeur "d'Alceste" sous son mouchoir en livrant cette hypothèse et en reconnaissant cette intelligence à une femme qu'il n'aime pas.
Toutefois, ce bref élan de générosité et de mansuétude en accordant le bénéfice du doute à Mme Joly, sera rapidement tempéré d'une part par ce que nous savons du sectarisme des Verts qui n'ont rien à voir avec celles et ceux qui, pour une très large part, contribuèrent aux succès d'Europe Ecologie, d'autre part par un contexte européen actuellement peu porteur et une radicalisation du débat politique français qui renforce le clivage traditionnel et risque de laminer les formations qui voudraient en sortir d'une manière ou d'une autre.

Les Verts français constituent une secte au contenu programmatique somme toute assez pauvre pour ne pas dire archaïque. Vraisemblablement, les années 2009-2010 furent traumatisantes pour eux, l'émergence d'un mouvement d'idées plus large à l'initiative de Daniel Cohn-Bendit qui les sortait de leur habituel fonds de commerce anti-nucléaire et les faisait rentrer dans un débat plus global mais aussi moins aisément identifiable en aura perturbé plus d'un. Sur le fond, rien chez les Verts n'a changé depuis leur premier candidat à une élection présidentielle, René Dumont. Selon la célèbre formule " nous n'avons pas de pétrole mais nous avons des idées", les Verts depuis 40 ans assènent le même discours avec une constance admirable et avec des résultats catastrophiques tout aussi constants, entre 1, 3 % et 5, 25 % meilleur résultat en 2002, anus horribilis. Malgré ces résultats, le discours reste identique, les Verts sont satisfaits. Tels les premiers chrétiens ils se réfugient dans leurs catacombes, ils restent entre eux et se contentent de peu. Nous sommes bien, les concernant, dans une optique de mouvement sectaire. Il y a tout lieu de penser que les Verts ne connaîtront cependant pas la destinée de ces premiers chrétiens et l'on se demande ce qu'ils souhaitent construire ou même s'ils souhaitent bâtir quoique ce soit sur cette première pierre des élections de 1974.
Comme le disait Coluche et en le paraphrasant concernant les Verts, "Des idées, tout le monde en a. Souvent les mêmes. Ce qu'il faut, c'est savoir s'en servir." ou encore "Ils ont des idées sur tout, ils ont en fait surtout des idées." Voici un florilège des idées d'EELV, choix naturellement subjectif et orienté, catalogue de bons sentiments, de vœux dont tout le monde se doute qu'ils resteront pieux, de formules creuses, vagues sans qu'à aucun moment ne soient évoqués les moyens de passer de la théorie à la pratique : "Favoriser la baisse du chômage par la réduction générale du temps de travail; Combattre les paradis fiscaux; Supprimer progressivement les dépenses de l’Etat qui vont à l’encontre de la protection de l’environnement; Créer des maisons de l’aide aux devoirs; Transformation du mode de consommation: Diminution drastique du gaspillage; Encadrer le capitalisme et le système financier au niveau Européen et mondial; Liberté et l'égalité de circulation de tous les humains; Au niveau mondial stopper la perte de la biodiversité d’ici 2020; Sortie totale et progressive du Nucléaire; Affirmation d'une politique de Non Violence et de prévention des conflits; Développement d'une agriculture paysanne de qualité et de l'agriculture biologique."
Seule concession à la dure réalité, la sortie "progressive" du nucléaire. Les Verts après avoir surfé quelques jours sur le tsunami Fukushima et exploité politiquement de façon éhontée cette tragédie, se sont rendus compte qu'ils seraient difficiles de vendre à leurs compatriotes en 2012, l'idée qu'ils devraient dans les deux ans produire leur propre électricité en pédalant sur leur bicyclette transformée pour l'occasion en centrale électrique et ce en attendant les lendemains chantants des éoliennes et des panneaux solaires !
Assommés, malmenés par le trublion Cohn-Bendit en 2009, les Verts ont bien vite relevé la tête et s'ils ont changé de masque en troquant les moustaches de Mamère pour les minauderies de Cécile Duflot, le repli identitaire est reparti de plus belle. Le grand mérite de la candidature de Nicolas Hulot aux primaires aura été de servir de révélateur de ce que les Verts peuvent produire de pire en matière de sectarisme, ces primaires, par bien des aspects, relevant plus des procès de Moscou ou des auditions Maccarthystes que d'un processus électif démocratique.
Alors face à ces redoutables procureurs et inquisiteurs en sorcellerie que sont les Verts, il n'est pas certain que la Dame de Scandinavie soit aussi à l'aise que lorsqu'elle faisait trembler les "puissants" dans son cabinet de juge d'instruction. Si son espoir est de dompter la bête, il faut lui souhaiter beaucoup de courage mais dans tous les cas son résultat en 2012 risque de ne pas être à la hauteur de celui qu'elle obtint à l'élection de Miss Norvège 1962.

Mme Joly est députée européenne, en d'autres temps ce mandat aurait sans doute eu des vertus "vendeuses" plus importantes qu'aujourd'hui. Certes, d'ici 2012 de l'eau coulera sous les ponts, le tout étant de savoir, toutefois, dans quel sens elle coulera. L'Europe est-elle à l'aube d'un cruel naufrage dans lequel celui de Mme Joly et celui d'EELV ne seront qu'un épiphénomène ? Difficile à dire. Dans tous les cas, sa qualité de députée européenne risque plutôt d'être contre productive et ne pas peser bien lourd dans ce qui déterminera le choix des français. Une Europe politique en panne et une Europe économique à la peine faute justement de ne pouvoir se tracer un véritable cadre politique pourraient bien amener nos compatriotes à privilégier une autre forme de repli, celui de l'intérieur.
A l'intérieur, ce repli pourrait bien renforcer la radicalisation du débat politique en France. Entre une Gauche sans véritable identité et une Droite de plus en plus "populaire", l'extrémisme constitue-t-il une piste pour qui veut gagner les élections présidentielles de 2012 ou à tout le moins y figurer "honorablement" ? C'est donc peut-être le pari de Mme Joly. Le NPA s'étant définitivement placé de lui-même hors jeu (autre naufrage), restent EELV et le Front de Mélenchon pour illustrer une Gauche non socialiste et gestionnaire de la réalité. La "sortie" du 14 juillet de Mme Joly a donné lieu à un timide rapprochement avec Mélenchon, pourrait-il constituer le prélude à une alliance objective dès le 1er tour pour 2012, permettant à ces deux formations réunies de prétendre à ce fameux score à deux chiffres. Encore faudrait-il que les ego soient rangés au placard pour permettre une telle éventualité. En tout état de cause, il n'est pas impossible que cette sortie "juilletiste" soit une amorce d'une telle stratégie. L'avenir le dira.

Mme Joly prenant conscience de l'inertie des Verts choisira-t-elle cette option, faute de quoi elle sombrera dans le naufrage de cette composante qui paraît bien devoir demeurer la seule d'EELV, les électeurs d'Europe Ecologie ayant déjà, dégoûtés, quitté le navire. Il y a fort à parier que les Verts ont fait déjà leur choix traditionnel, négocier un ou deux portefeuilles ministériels, véritables larbins du PS tout en se donnant bonne conscience et en se drapant dans leur vertu outragée. Est-ce là l'ambition de Mme Joly ? En faisant sa "sortie" sur le 14 juillet, elle a indéniablement "fait" un coup, prenant de court tous ses concurrents à Gauche et même apparemment les militants Verts, à preuve la réaction à retardement de Cécile Duflot.
Mme Joly veut-elle jouer les passionarias de la Gauche bobo et par la bande retrouver les vertus soixante-huitardes d'un Dany le Rouge rangé des voitures ? La réaction excessive voire surréaliste de la Droite populaire que François Fillon d'une manière bien décevante semble vouloir chevaucher allègrement ainsi que celle du FN, ont peut-être été recherchées volontairement. Elles situent ainsi Mme Joly parmi les victimes d'un vichysme rampant et la désignent comme porte-drapeau d'un politiquement incorrect de gauche, brisant les tabous et plaçant la Gauche "traditionnelle" devant un cruel dilemme : suivre et se décrédibiliser auprès des modérés, refuser et laisser le terrain de la contestation même la plus "douce" à Madame Joly.
Piège pour la Gauche mais également piège pour la Droite. François Fillon qui semblait avoir hésité lors des élections cantonales, a cette fois décidé de rompre définitivement toute idée de front républicain. Bien sûr, la "sortie" du 14 juillet permet à la Droite populaire de labourer ce qui est devenue sa terre de prédilection, les plates-bandes du FN, racisme, xénophobie, destruction du lien social au profit d'une véritable politique de classe. Dans le même temps, comme il a déjà été dit dans d'autres messages, cette Droite joue avec un feu bien dangereux pour la Nation mais aussi pour elle. Faire alliance avec le FN semble difficile, ce serait pourtant la solution arrivé à ce point de dérive droitière mais comme pour la Gauche c'est aussi s'aliéner les républicains modérés du Centre et d'une Droite nostalgique des valeurs du gaullisme.

Alors, Madame Joly a-t-elle réussi son premier coup et nous prépare-t-elle d'autres surprises ?
Mais foin de toutes ces supputations, Madame Joly n'est peut-être que la "naïve inconséquente" décrite par Laurent Joffrin. Une naïve touchée par le syndrome DSK, le syndrome de "ceux qui voudraient bien y aller mais qui par inconséquence se mettent dans des situations telles, qu'ils ne peuvent plus y   aller".

Nous verrons…

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