Horizon chimérique

J'espère qu'il ne m'en voudra pas, j'ai choisi d'illustrer le message d'aujourd'hui avec un très beau dessin de l'un de nos membres, Jean-François, tiré de son blog recommandé "un croquis - une journée". Il est intitulé "Au nord du parc Kadriorg - plage" (paysages d'Estonie - Tallinn).

Je vais reprendre ce soir mon RER A avec la lassitude du naufragé qui aspire au calme de son week-end. Espérons que le retour se fera sous les mêmes auspices de paix et peut-être de sérénité.

Parfois, le naufragé aimerait voir arriver au bout de son quai autre chose que sa "rame" habituelle. Il souhaiterait dans un fantasme, un rêve fou et exotique, distinguer à l'horizon du tunnel, la proue d'un navire toutes voiles déployées, claquant sous la brise marine et non sous le souffle nauséabond de la turbine brassant l'air dans les souterrains.

Parfois, le naufragé aimerait monter dans sa "rame" comme sur le pont d'un vaisseau de haut-bord qui l'emmènerait vers d'autres rivages que ceux de sa banlieue, vers des plages comme celle de ce paysage estonien, pure et limpide comme un diamant glacé.

Hélas comme l'a dit un poète et comme l'a mis en musique un compositeur, cette envie restera inassouvie et cet horizon espéré demeurera chimérique.

"Vaisseaux, nous vous aurons aimés en pure perte ;
Le dernier de vous tous est parti sur la mer.
Le couchant emporta tant de voiles ouvertes
Que ce port et mon cœur sont à jamais déserts.

La mer vous a rendus à votre destinée,
Au-delà du rivage où s’arrêtent nos pas.
Nous ne pouvions garder vos âmes enchaînées ;
Il vous faut des lointains que je ne connais pas.

Je suis de ceux dont les désirs sont sur la terre.
Le souffle qui vous grise emplit mon cœur d’effroi,
Mais votre appel, au fond des soirs, me désespère,
Car j’ai de grands départs inassouvis en moi."

Jean de la Ville de Mirmont (L'horizon chimérique) repris par Gabriel Fauré pour son cycle de mélodies du même nom (Deezer).